Le carnaval de la Havane, à l instar de celui de Rio, est l'opportunité pour le peuple cubain de déambuler pendant plusieurs jours et plusieurs nuits dans les rues de la ville en dansant. Moins célèbre que les carnavals brésiliens, cette fête conserve toutefois une valeur essentielle d'unification sociale. Une fois par an, noirs, métisses et blancs se retrouvent aux rythmes de la "comparsa". Claude Santiago en restitue ici l'énergie et l'émotion.
La "comparsa" cubaine, équivalent de l'école de samba brésilienne, désigne à la fois la danse et le groupe de danseurs qui l'exécutent. Les gens s'organisent par quartiers, et chaque "comparsa" représente un épisode de l'histoire cubaine ou une petite pièce de théâtre. Les couleurs, les traditions issues d'héritages ethniques variés fusionnent, et les différences s'effacent pour laisser place à la fête. Au XVIIIe siècle, ces processions regroupaient des esclaves qui défilaient dans différentes tenues d'apparat pour l'Epiphanie. Aujourd'hui, la fête prend des airs d'exorcisme du passé esclavagiste de l'île. Enrique Nunez Rodriguez analyse ce phénomène avec finesse : "Dans les périodes d'abondance comme dans les périodes difficiles, le dénominateur commun, c'est la joie. Ce peuple résiste toujours aux difficultés."