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L'actualité colombienne en 1996

Le chef de l'État, Ernesto Samper, est apparu de plus en plus fragilisé par l'enquête au sujet de sa campagne présidentielle, qui aurait été financée par les barons de la drogue. Des soupçons qui, ajoutés à la violence endémique, n'ont pas peu contribué à alourdir le climat politique. Toutefois, les performances économiques ont été, une fois de plus, de bonne tenue.
En décidant, le 1er mars 1996, de rayer la Colombie de la liste des pays qui coopèrent avec les États-Unis dans la lutte contre la drogue, le président Bill Clinton a privé Bogotá de l'aide bilatérale américaine tout en lui interdisant l'accès à d'importants financements internationaux. Il est vrai que la lutte contre les trafiquants – en dépit du démantèlement partiel du cartel de Cali et du cartel de Medellín – reste obérée parla corruption et par les soupçons qui continuent de peser sur le président Ernesto Samper. Celui-ci était toujours au centre d'une enquête concernant le financement de sa campagne présidentielle (1994) conduite par une commission parlementaire. Cette affaire alourdit un peu plus la vie politique d'un pays où la violence est endémique, et encourage à l'évidence celle des divers groupes de guérilla qui contrôlent des zones de plus en plus importantes du territoire colombien.
Face à la radicalisation de la violence, dont les enlèvements avec demande de rançon constituent l'aspect le plus radical, le chef de l'État a envisagé de présenter au Congrès un projet de loi visant à rétablir la peine de mort – abolie en 1810 – pour les auteurs «d'enlèvements, de massacres ou d'homicides sur des personnes sans défense». Si la proposition, faite par un président affaibli par la crise politique, et étonnante venant de la part d'un gouvernement libéral, n'a pas fait l'unanimité parmi les parlementaires, elle n'en a pas moins rencontré un certain écho dans la population. Un sentiment que l'on peut rapprocher de la recrudescence des enlèvements, dont la moyenne s'établissait à trois par jour au cours de l'année 1995. Cette entreprise criminelle profite à la fois à quelques bandes de délinquants très organisées, qui en ont fait leur spécialité, et aux divers groupes de guérilla. Selon le gouvernement, la guérilla reçoit en moyenne 1?5 million de francs par personne enlevée. À raison d'environ 500 enlèvements par an, les bénéfices sont loin d'être négligeables. D'ailleurs les guérilleros, mi-révolutionnaires, mi-bandits, voire parfois simples supplétifs des trafiquants de drogue, ont renoncé, pour la grande majorité d'entre eux, à conquérir le pouvoir: la lutte armée apparaît davantage comme un mode de vie que comme le moyen d'imposer la justice sociale.
Malgré la crise politique, la décision de Washington de retirer à la Colombie son «certificat de bonne conduite» et la violence endémique, l'économie colombienne est restée relativement stable. Ainsi la croissance a-t-elle suivi la courbe ascendante amorcée il y a une vingtaine d'années (les 5,5 % de 1995 devaient se confirmer en 1996) tandis que les investissements étrangers continuaient d'irriguer le pays. Selon les experts, la Colombie demeure en effet, avec le Chili, un des «meilleurs risques»d'Amérique latine. Le pétrole, qui, depuis la découverte d'un important gisement en 1992, a supplanté le café dans les revenus du pays, et la bonne tenue des exportations de fleurs et de bananes ont largement contribué à la croissance. De plus, le pacte social – une convention passée entre le patronat et le gouvernement – a permis de contenir le taux d'inflation en dessous de 20 %, le plus bas niveau enregistré depuis une dizaine d'années.
Mais en Colombie, comme dans la plupart des pays d'Amérique latine, les fruits de la croissance ne sont toujours pas de nature à résorber les inégalités sociales; en témoigne l'appauvrissement de la classe paysanne qui vient chaque année grossir un peu plus les principales villes du pays, où l'on désespère de voir se réaliser le «bond social» promis par le chef de l'État.

© Hachette Multimédia / Hachette Livre, 2002

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